Rocamadour, vertigineuse cité médiévale et lieu de pèlerinage marial

Incontournable destination touristique du Lot, Rocamadour représente tout à la fois le génie bâtisseur des hommes, l’éternelle quête spirituelle mais aussi la beauté sauvage des causses creusés de gorges profondes. Une seule route mène à la cité médiévale mondialement connue. Mais c’est à pied qu’il faut y venir, en empruntant les chemins ancestraux et les escaliers expiatoires. Et ils sont nombreux, pèlerins ou simples curieux, à venir ici, attirés par la magie du lieu.

Rocamadour est une pépite du patrimoine d’art et d’histoire de France. Extrêmement riche, compact et complexe, le site se découvre à pied. Soit, pour un émerveillement progressif, en empruntant la « voie sainte » depuis le hameau de l’Hospitalet ou l’un des GR qui passent par là (il y en a 4) ; soit, a minima, en empruntant escaliers et ruelles médiévales après avoir garé sa voiture dans l’un des parkings (gratuits) du fond du vallon.

Prévoyez 3h pour parcourir la cité de bas en haut et retour.

Rocamadour, cité verticale à 3 niveaux

Accrochée à la falaise, la cité de Rocamadour apparaît comme une improbable superposition d’édifices imbriqués et accrochés à une falaise qui domine de 150m la vallée encaissée de l’Alzou, un affluent de la Dordogne.

Les trois « étages » de Rocamadour datent du Moyen Âge et reflètent les trois ordres de la société : les chevaliers au-dessus, les clercs religieux au milieu et les travailleurs laïcs en bas près de la rivière.

« Les maisons sur le ruisseau,
les églises sur les maisons,
les rochers sur les églises,
le château sur les rochers »

Aujourd’hui, la petite cité médiévale compte moins de 700 habitants mais accueille chaque année 1,5 million de visiteurs (touristes, marcheurs, pèlerins).

La Grand-Rue

En venant du parking, on entre dans la cité médiévale par la porte du Figuier et l’on suit la rue principale. Boutiques, restaurants et cafés s’y bousculent, tout comme les touristes … c’est sans grand intérêt ! Pourtant cette artère existe depuis le Moyen-Âge et a toujours été commerçante. Un petit effort d’imagination s’impose donc pour remonter le temps et remplacer les attrapes-touristes actuels par les échoppes des artisans et les commerces de bouche de l’époque médiévale.

Pour nous y aider, il subsiste des traces des maisons de l’époque (voutes en ogive, bornes pour attacher les chevaux, etc.). Mais la renaissance du pèlerinage au XIXe siècle a déclenché une vague de modernisation que l’on ne peut que regretter !

La partie sud de la rue de la Couronnerie, du côté de la Porte Hugon, est plus intéressante. Arrêtez-vous devant les maisons de la Louve, de l’Écu et les demeures de la place Caretta (XIIIe s.).

L’Hôtel de Ville (ou maison Mazot) a lui aussi retrouvé belle allure grâce à une restauration soignée.

Le Grand Escalier

La visite démarre véritablement au pied du Grand Escalier qui invite les visiteurs à s’élever vers la cité religieuse. Le principe même de cette ascension, qui n’est pas sans rappeler la montée vers l’abbaye du Mont-Saint-Michel, donne une toute autre dimension à la visite de ces lieux incroyables.

La notion de montée, d’ascension vers le divin, fait partie du fonds commun de toutes les religions. Dans le Livre de la Genèse (28,12), déjà le songe de Jacob dressait une échelle ou rampe à gradins entre la terre et le ciel, à la manière des escaliers reliant les étages des temples mésopotamiens appelés ziggurats.

220 marches … parcourues jadis à genoux, en s’arrêtant à chaque marche pour prier et faire pénitence.  Pour notre part, si nous multiplions les pauses, c’est plutôt pour admirer le paysage et les prouesses des bâtisseurs … mais aussi pour reprendre notre souffle !

Bon à savoir : Pour les moins valides, il existe depuis 1988 un ascenseur qui mène au cœur du sanctuaire, puis un second jusqu’au château.

La dernière volée de marches passe sous un porche formé par les bâtiments du sanctuaire, que l’on appelle la « Porte sainte ». On débouche alors sur l’esplanade.

Rocamadour, haut-lieu marial de l’Europe médiévale

Au Moyen-Âge, Rocamadour est un des plus importants lieux de pèlerinage de toute la chrétienté. Fréquenté par tous, anonymes ou célèbres, riches ou mendiants, moines ou rois. Tous viennent y vénérer Notre-Dame de Rocamadour, à qui plusieurs miracles sont attribués.

Pour accueillir cette foule de pèlerins, la basilique Saint-Sauveur est édifiée dès le 12e siècle. Ainsi que l’imposant Palais des Évêques, destiné à protéger le site (et ses richesses) des attaques et des pillards.

Plus tard, les guerres de religion ont amorcé le déclin de ce lieu de pèlerinage, tout comme l’apparition de la Vierge à la grotte de Lourdes qui draina les foules de pèlerins vers le sud.

Au XIXe siècle, les évêques de Cahors font restaurer les sanctuaires, dans l’espoir de relancer les pèlerinages. Aujourd’hui, Rocamadour est redevenu un but de pèlerinage, ainsi qu’une étape sur le chemin vers Saint-Jacques de Compostelle.

L’esplanade et ses 7 édifices religieux

Située à mi-hauteur, l’esplanade des sanctuaires est le cœur vibrant de la cité. La place pavée de pierres blanches est bordée de 7 édifices religieux. Un chiffre 7 hautement symbolique.

Il évoque les jours de la création et du parcours d’une vie. Entre la création et le jugement dernier se situe le pèlerinage terrestre des humains, incités à appliquer les 7 miséricordes (donner à manger à ceux qui ont faim, donner à boire à ceux qui ont soif, vêtir ceux qui sont nus, accueillir ceux qui sont sans abri, soigner ceux qui sont malades, visiter et secourir les prisonniers de guerre, ensevelir les morts).  Le chiffre 7 est aussi celui des degrés d’initiation par lesquels devaient passer les fidèles pour atteindre la purification (source).

Le parvis est construit sur deux niveaux :

  • Le premier niveau où aboutit l’escalier de la porte sainte, et d’où part le tunnel, dit « Porte Saint-Martial », qui permet de sortir en passant sous la basilique.
  • Le second niveau, un peu au-dessus, donne accès à la basilique, à la chapelle Notre-Dame et à la chapelle Saint-Michel.

On découvre donc progressivement la basilique et les chapelles :

  • la basilique Saint-Sauveur, de style romano-ogival (11e – 13e), appuie ses deux nefs sur la paroi de la falaise. Une mezzanine en bois, rajoutée au XIXe s., permet d’accueillir plus de pèlerins ;
  • la chapelle Saint-Amadour, forme une sorte de fausse crypte en contrebas de la basilique. On y descend par un escalier de 35 marches pour vénérer les reliques de Saint-Amadour ;
  • la chapelle Sainte-Anne renfermeun retable baroque qui présente les mystères de la Vierge Noire ;
  • la chapelle Saint-Blaise, protecteur des animaux et guérisseur, martyr du IVème siècle, très populaire en haut Quercy où les Templiers propagèrent ses mérites lorsque ses reliques ont été rapportées par les croisés ;
  • la chapelle Saint-Jean-Baptiste, transformée en baptistère au XIXème siècle, elle abrite le mausolée de Jean de Vallon, commandeur de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, mort en 1518 ;
  • la chapelle Notre-Dame, blottie contre le rocher, est le cœur de la spiritualité de Rocamadour. Depuis près de 1000 ans, des pèlerins venus du monde entier viennent y prier la Vierge Noire. Écrasé en 1476, le premier oratoire a été remplacé par une chapelle de style gothique. Celle-ci, saccagée à son tour pendant les guerres de religion et sous la Révolution, a été restaurée au 19e siècle. La cloche miraculeuse et les nombreux ex-voto témoignent des grâces reçues en ce lieu et sur les océans.

  • la chapelle Saint-Michel, qui domine le parvis, était la chapelle privée des moines bénédictins. Construite à même la roche de la falaise, ne ratez pas les fresques sur le mur extérieur (XIIe).

Une huitième chapelle Saint-Louis, située sous la chapelle Saint-Michel, consacrée au monde du rugby (fortement implanté dans le Quercy), est venue compléter l’ensemble, il y a quelques années.

La Vierge Noire

But ultime du pèlerinage à Rocamadour, la statue de la Vierge Noire aurait été découverte au XIIème siècle. On lui associe de nombreux miracles, souvent en mer. Ce qui explique les nombreuses maquettes de bateau suspendues aux voutes de la chapelle.

Le Livre des Miracles de Notre Dame, qui attribue plus de 120 miracles à la Vierge Noire,  assoit la réputation de Rocamadour dès 1172. De plus, le pèlerinage d’Henri Plantagenêt, roi d’Angleterre, miraculeusement guéri, inspirera et sera suivi par les plus illustres personnages.

La statue de la Vierge Noire, en bois peint en noir rehaussé de plaques métalliques, mesure 66cm de haut et 21cm de large. L’aspect sombre de Notre-Dame de Rocamadour n’est attesté qu’à partir du XVIIe siècle. Et l’origine de cette couleur noire a donné lieu à de nombreuses supputations : encrassement par le noir des bougies, altération progressive de pigments instables, …

Bon à savoir : la sportelle (senhal en occitan) est l’insigne du pèlerin de Rocamadour. Au Moyen-Âge, cette médaille à l’image de la Vierge miraculeuse était remise aux pénitents à qui des tribunaux ecclésiastiques, et parfois civils, imposaient le pèlerinage à Rocamadour en guise de pénitence.

En plomb, étain, cuivre, argent ou or, jadis fabriquée exclusivement par les orfèvres établis autour de la Place des Senhals (au haut du Grand Escalier), elle est aujourd’hui encore vendue au magasin du pèlerin, sous sa forme traditionnelle de médaille à coudre.

Saint Amadour

Entre la chapelle Saint-Michel et la chapelle Notre-Dame, une niche dans la falaise. C’est là qu’aurait été découvert en 1166 un corps parfaitement conservé. Il fut identifié à Saint Amadour, l’un des saints ermites établis dans le canyon de l’Alzou où il aurait bâti un oratoire en l’honneur de la Vierge. Cet oratoire est à l’origine du pèlerinage.

De nombreuses légendes courent quant à l’identité réelle ces reliques. Au XVe s. certains chroniqueurs assimilent Saint Amadour à Zachée … mais cela semble peu probable. Quoi qu’il en soit, la découverte de ce corps intact a contribué à l’essor du sanctuaire.

Les reliques du saint ont été enfermées depuis le Moyen Âge dans des châsses successives, pillées à diverses reprises (1183, 1235), et même brûlées (en 1562…). Néanmoins il reste quelques éléments : main, bras, fragments de tête. Un reliquaire de bois doré avait été confectionné au XVIIe siècle et était déposé dans la chapelle Saint-Amadour. Il se trouve au Musée d’art sacré. Les reliques d’Amadour ont été récemment remises en honneur dans le sanctuaire (avril 2016) et déposées dans la basilique Saint-Sauveur. On a confectionné un nouveau reliquaire à cette occasion. (source)

L’épée de Roland

Une autre légende hante ces lieux … Si vous prêtez attention, vous verrez au-dessus de la porte de la chapelle de Notre Dame, une épée de fer fichée dans la falaise. La légende l’attribue à Roland, le neveu de Charlemagne.

La légende raconte que, cerné par les Sarrasins, Roland, blessé, décide briser son épée pour que l’ennemi ne s’en empare pas. Mais ne pouvant la briser, il implore l’archange Saint Michel et la lance au loin, à l’écart des infidèles. C’est ainsi que l’épée se retrouva plantée miraculeusement, à plus de 200 km de Roncevaux, dans la roche de Rocamadour.

Le chemin de croix

Poursuivons à présent notre ascension vers le sommet de la falaise en empruntant le chemin de croix. Agréablement ombragé, il décrit d’amples lacets. À chaque tournant, une station de la passion du Christ. Et tout en haut, un belvédère avec la Croix de Jérusalem.

Aménagé en 1880 à partir d’un ancien chemin, il monte en sous-bois jusqu’aux remparts.

Après les grottes de la Nativité et du Sépulcre, on aperçoit la grande croix de Jérusalem, rapportée des lieux saints.

Rocamadour, citadelle à protéger

Arrivé sur le plateau, au sommet de la falaise, on se rend compte que c’est le point faible de la cité médiévale. Il fallait à tout prix protéger la cité de la foi des assaillants. C’est la principale raison d’être des remparts et du château qui surplombent le site.

Le château

Au bord de la falaise, le château actuel a été reconstruit au XIXe siècle, en lieu et place d’un fort qui défendait le sanctuaire au XIVème siècle.

Aujourd’hui, ces bâtiments sont le siège du diocèse. Ils ne se visitent pas.

Un escalier « secret » (l’escalier des chapelains), partiellement creusé dans la falaise, relie directement le château à la sacristie de la basilique 80 mètres plus bas. À ce jour, cet ouvrage remarquable du XVIIIe siècle est réservé au personnel du sanctuaire. Mais il est question de le remettre aux normes … et éventuellement de le rouvrir au public.

Les remparts

Les 200m de remparts édifiés au XIIIe siècle devaient empêcher toute invasion des sanctuaires par le sommet de la falaise. C’est indiscutablement l’endroit le plus vulnérable de Rocamadour.

Moyennant une modeste contribution de 2€, vous aurez accès aux remparts et à un très joli point de vue sur la cité et sur les environs.

À voir dans les environs immédiats

Quelques suggestions, s’il vous reste encore un peu de temps après votre visite de Rocamadour.

  • Le rocher des Aigles: Tout près des remparts, se trouve un centre d’élevage et de reproduction de rapaces. Vous pourrez y assister à des démonstrations de vol avec explications.
  • L’Hospitalet : Du belvédère de ce petit village, vous aurez l’une des plus belles vues sur Rocamadour et le vallon de l’Alzou.
  • Le moulin de Cougnaguet : moulin fortifié datant du 15e Ses meules broyaient 300 kg de grains à l’heure (rendement exceptionnel pour l’époque). Elles fonctionnent encore.
  • La vallée de l’Ouysse offre de superbes points de vue. Deux balades en boucle (4,5 ou 8km) vous feront découvrir les vallées de l’Alzou et de l’Ouysse, le travail des moulins et de l’eau.
  • Le causse de Gramat : vaste plateau calcaire, à découvrir à pied, à vélo ou en voiture.

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