Un dimanche au parc de Courances
Courances. Tout à la fois classique et romantique, historique et contemporain. Un château et son parc à l’atmosphère tour à tour intime et grandiose. Dans ce domaine créé au XVIe siècle, l’eau, le végétal et la pierre se conjuguent à merveille pour créer un lieu envoûtant où la nature et l’eau jouent avec les perspectives, les niveaux et les camaïeux de vert et de bleu.
Mai 2022. Non loin de Fontainebleau, un autre château, moins réputé et moins pompeux, m’attire irrésistiblement. Ce sera le premier coup de cœur de notre escapade de printemps.
En fait, ce n’est pas vraiment le château qui m’intéresse, même s’il est harmonieux et bien décoré. C’est surtout l’incroyable parc qui l’entoure.
Courances : un château privé ouvert au public
Construit entre 1622 et 1630 par Claude Gallard, notaire de Louis XIII, le château de Courances a connu de nombreux changements au fil des siècles.
Délaissé au XIXe siècle, le château se détériore. Heureusement, un banquier suisse, le baron Samuel de Haber, le sauve de la ruine et le fait restaurer à partir de 1872. Il y ajoute même des éléments significatifs, comme l’escalier en fer à cheval (copié du château de Fontainebleau) et modifie le revêtement des façades.
Aujourd’hui, ce château toujours habité, ne se visite qu’à certaines heures, avec un guide.
Le parc de Courances : un jardin d’eau remarquable
Labellisé « Jardin remarquable », le parc du château s’étend sur près de 75 ha. Dès l’entrée, le ton est donné par une allée majestueuse, bordée par deux canaux plantés de platanes centenaires.
L’eau est l’élément structurant de ce jardin conçu à la Renaissance : les 17 pièces d’eau sont alimentées par 14 sources et par la rivière École qui s’écoule à l’ouest du parc. Ici, l’eau coule tout le temps. Pas de bassins aux eaux stagnantes. Ce sont d’ailleurs ces nombreuses « eaux courantes » qui seraient à l’origine du nom du lieu.
Bon à savoir : Très longtemps présenté comme une œuvre de Le Nôtre, le parc de Courances est en réalité plus ancien d’un siècle. C’est avant tout un jardin d’eau de la Renaissance, style qui succéda au jardin clos médiéval et qui précéda le parc classique.
Le parc du château est un incroyable camaïeu de vert et de bleu, issu du mariage de l’eau et du végétal. Notre promenade nous mènera à travers buis et pelouses, par de larges allées ombragées aux différentes essences d’arbres. Où les reflets des arbres et des bâtiments dans les multiples miroirs d’eau évoluent selon les angles et points de vue.
Le murmure des sources répond aux trilles joyeux des oiseaux … un pur enchantement !
À l’ombre ou au soleil, flânez au plus près des plans d’eau, admirez les lignes et les harmonies, glissez-vous dans les sous-bois à la recherche des sources, observez l’envers des décors et dialoguez avec les statues.
Bref, laissez-vous happer par la magie des lieux.
Le parc est vaste. Prévoyez au minimum 2h pour en explorer toutes les facettes. Vous recevrez un plan à l’entrée afin de vous repérer et de ne rien rater !
A Courances, quatorze sources alimentent les diverses pièces d’eau, douves et canaux. L’eau jaillit d’une série de « gueulards » qu’aucune pompe ne fait cracher, tout au plus une subtile science des niveaux. Une merveille d’ingénierie hydraulique naturelle.
5 siècles d’histoire des jardins
La documentation nous apprend que cinq siècles d’histoire des jardins se cristallisent dans ce lieu enchanteur.
16e siècle : naissance du jardin d’eau
En 1552, Cosme CAUSSE achète un manoir relativement modeste, presque sans jardin. Le bâtiment est installé sur deux plateformes entourées de fossés en eau qui sont prolongés vers le village, par des pièces d’eau de part et d’autre de l’Allée d’honneur.
Cosme fera l’acquisition de terrains supplémentaires pour s’assurer la maîtrise de la rivière de l’École et de quelques-unes des quatorze sources qui donnent son allure au lieu. Sur cette nouvelle surface, il fait créer :
- Le Dôme (restauré en 2005) ;
- La Salle d’eau, bassin encadré par des « gueulards » (cracheurs d’eau) de grès
- Le Grand Canal de 600 m de long, alimenté par une dérivation de la rivière École
17e : agrandissement et embellissement du parc
Au XVIIe siècle, le château passe aux mains de Claude II Gallard qui poursuit les achats de terres et l’embellissement des jardins. C’est de cette époque que datent
- La Gerbe (bassin à 10 côtés auquel il manque aujourd’hui son jet d’eau central)
- Le Rond de Moigny (le point le plus éloigné du château
- Les Nappes – trois marches de niveaux différents suffisent à mettre l’eau en mouvement
18e siècle : Symétrie et harmonie du parc
Au XVIIIe siècle le château passe aux mains des Nicolaÿ. C’est de cette époque que date
- le Miroir, pièce d’eau rectangulaire spectaculaire (1 hectare) dans laquelle se reflète le château
- Le portail en pierre laisse la place à une grille
- Des platanes sont plantés de part et d’autre de l’Allée d’Honneur
19e : restauration du parc délaissé
Avant toute chose, le nouveau propriétaire, le baron de Haber, fait procéder au curetage de l’ensemble des douves, bassins et canaux. Le système hydraulique du parc est rénové.
Le parti-pris de cette époque est de restituer le parc “à la française”. Destailleur exhume le grand axe, comble les canaux de l’Allée de Moigny et crée après le Miroir, un nouveau bassin, le Dauphin. Il bouchera d’autres petites pièces d’eau dans la partie sud-ouest du parc.
20e : parc à la française redessiné par Duchêne
En 1906, les paysagistes Duchêne poursuivent l’œuvre d’embellissement du parc, toujours dans un souci de simplicité et de sobriété. On leur doit l’aspect actuel de Courances et son unité d’ensemble :
- Ils recréent la Salle d’eau qui existait sur les plans anciens
- Ils redistribuent les 14 “gueulards” qui l’encadraient autour des nouveaux bassins, dans les douves et ailleurs pour mieux relier les différentes époques du parc
- Ils inventent l’ensemble Baigneuse-Fer à cheval
- Ils créent des broderies de buis devant la façade du château, côté parc.
- Ils plantent un quinconce de Marronniers qui fait fonction de filtre optique entre le devant et l’arrière du parc
Création d’un jardin japonais
Profitant d’une pièce d’eau en contrebas du moulin de l’ancienne scierie, la propriétaire de l’époque, Berthe de Béhague, entreprend d’y créer un surprenant jardin anglo-japonais. Abandonné pendant la dernière guerre, il doit sa renaissance à Philippine de Ganay.
21e siècle : vers un entretien simplifié et durable du parc
Aujourd’hui, les propriétaires accordent une grande importance à la qualité et à la pérennité de l’entretien des 35 ha de jardin et 40 ha de bois. 4 employés polyvalents y travaillent à plein temps (et non plus 22 jardiniers comme au XIXe).
On assiste tout d’abord à une simplification des formes afin de faciliter l’entretien : certaines allées de gravier ont disparu, remplacées par de grandes pelouses ; les arbres ne sont plus taillés en rideau mais poussent plus librement. Tout cela ajoute un charme et une poésie qui rend ce parc classique moins rigide et austère que d’autres parc « à la française ».
Les sous-bois sont progressivement mis en valeur pour faire ressortir le côté très naturel du parc. C’est l’occasion de découvrir une jolie collection de fougères.
Certains arbres retrouvent l’espace nécessaire pour mettre valeur de leur développement remarquable.
Enfin, depuis 2012, l’accent est mis sur le « zéro phyto » (entretien sans aucune chimie). Un exemple parmi d’autres : ce sont des carpes végétariennes, importées de Mongolie, qui régulent le développement des algues et lentilles dans les bassins.
L’histoire se poursuit aujourd’hui grâce à l’actuelle chatelaine, Valentine de Ganay, qui s’emploie avec énergie à maintenir la magie du lieu.
Depuis 2013, le potager du château (qui ne se visite pas), abandonné après la Seconde Guerre mondiale, est à nouveau cultivé et tourné vers l’agriculture bio. Les récoltes du potager sont en vente chaque fin de semaine à la boutique des Jardins de Courances.
La Foulerie
L’ancien moulin à chanvre du XVIIe siècle a été transformé en salon de thé. La terrasse avant fait face au jardin japonais. Une pause bien méritée après une longue promenade dans le parc. D’autant plus que les pâtisseries sont succulentes (hm … le crumble encore tiède, un vrai régal) et la sélection de thé sympa.
Pour aller plus loin
Un documentaire d’Arte, de la série Jardins d’ici et d’ailleurs, détaille tout cela dans une superbe vidéo.
Courances en pratique
- Le Parc et le château de Courances sont ouverts du premier dimanche d’avril jusqu’à la Toussaint, les week-ends et jours fériés, de 14h à 18h.
- L’intérieur du château n’est accessible qu’en visite guidée : à 14h30, 15h30, 16h30 et 17h30 (fermé en juillet et août)
- Le salon de thé est ouvert aux mêmes heures que le Parc.
- Tarif : 9,50€ – gratuit pour les moins de 13 ans
- Parking facile en face du château (gratuit)
- La boutique « les Jardins de Courances » propose des produits locaux et issus du potager du château
- Derrière le jardin japonais, le Hameau de Courances est constitué d’anciennes maisons entièrement rénovées et proposées à la location. Si vous rêvez d’un séjour dans un cadre enchanteur … vous aurez le choix entre l’ancienne demeure du Régisseur du Château ou l’une des maisons du Hameau : l’Atelier, la Pompe et le Moulin.
- Tous les détails sur le site du château : www.domainedecourances.com
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